Où va la sève ?
J'ai
laissé ma vie devenir un gros bordel, en me disant que j'arriverais à
tirer mon épingle du jeu. Maintenant je caresse la barbe naissante sous
mon menton d'un air perplexe en me demandant comment je vais m'en
sortir. La lecture juste terminée de Thérapie de David Lodge n'arrange rien, avec son fatras allègre de réflexions philosophiques
religieuses et érotiques.
L'éros justement fait une belle
entrée dans les mots des autres, on sent le retour des saisons chaudes.
Dans mon corps aussi. La sève se réveille puissamment. Non pas que je
sois resté sans désir en hiver, mais en cette période de l'année, les
sensations associées sont décuplées. Moi, je décris ça comme un
déséquilibre. Je me retrouve au bord d'un gouffre devant lequel un
léger vertige me chatouille agréablement la partie inférieure du
ventre. Entre le vide, l'attirance qu'il suscite et le désir de le
combler, papillonnent des sensations mitigées, douces ou violentes,
confortables ou dérangeantes, profondes ou superficielles.
Et
j'assiste à la montée en puissance de ces élans en tentant de garder du
recul, ne sachant comment je pourrais les laisser sexe-primer, vu les
circonstances. Avec cette impression douce amère d'un gaspillage
d'énergie, de chaleur, de volupté et de jouissances qui s'évanouissent
définitivement dans le néant des intentions périmées.