Une heure par semaine
Les mardis, entre 17h40 et 18h40.
Je me retrouve seul avec ma fille, une heure non pas à tuer mais à faire vivre, dans le quartier des Eaux-Vives. Jusqu'avant les vacances, c'était promenade au parc. Depuis l'heure d'hiver et le temps d'automne, tout est à réinventer. Alors, hier, traversée de la rade en bateau, dans la nuit et sous la pluie. Habitacle étroit, odeurs de graisse et de diesel, lumières humides, crapotement du moteur, crissement de l'essuie-glace avant. Le bateau glisse soudain sur une masse sombre. Silence. Le silence des voyages. Mis en musique par les vibrations du moteur, qui nous plonge dans un quasi hypnotisme. Elle pose sa tête contre moi. Je ne sais pas comment elle vit ce voyage, avec ses yeux d'enfant, ses yeux de rêve. Comment cet instant va vivre dans son imagination. Elle serre ma main dans la sienne, les yeux grand ouvert ; je sais que c'est en faisant rêver les enfants qu'on les aide à grandir. Le soir, en la couchant, elle me reparle de ce moment, de la lumière rouge du bateau, des vagues soulevées à notre passage, de notre course sur les quais ponctués de flaques. Et elle s'endort en souriant.